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Le charbon : comment s’est-il formé ?

Nous pourrions bien l'appeler diamant noir. Chaque sac représente énergie et civilisation.  -- Ralph Waldo Emerson

Qu'on l'appelle diamant noir, énergie ou charbon, c'est l'une des plus utiles ressources naturelles trouvées dans la terre. Il est composé de matière végétale modifiée par la chaleur, la pression, l'activité catalytique et la décomposition. Mais d'où vient la matière végétale ? La question a été longtemps un sujet de controverse. La majorité de ceux qui ont étudié le charbon croient qu'il provient d'accumulations organiques naturelles telles que des tourbières, des marais et des marécages qui ont été progressivement recouverts. Une minorité suggère qu'une partie, sinon la plus grande partie, du charbon s'est formée à partir de matière végétale venue d'ailleurs après transport.

Au 18e siècle et au début du 19e, ceux qui étudiaient la terre soutenaient largement l'idée selon laquelle le charbon provenait de la matière végétale ensevelie au cours d'une catastrophe majeure (le déluge de Noé). Ils attiraient l'attention sur des indices suggérant que la formation du charbon ne ressemblait à aucun processus actuel. Ils faisaient observer que les tourbières et marécages actuels ne sont pas comparables aux couches de charbon en extension latérale, en profondeur et en composition.1

Ensevelissement catastrophique ou accumulation graduelle ?

Avec la montée de l'uniformitarisme,2 les scientifiques commencèrent à expliquer tous les phénomènes géologiques par des processus observables. Charles Lyell, promoteur du principe uniformitariste, visita certaines régions houillères, à la fois en Europe et en Amérique du Nord.3 Lui et d'autres chercheurs notèrent l'association d'arbres pétrifiés debout avec les couches de charbon. Ils soutinrent que le charbon ne pouvait être le produit d'un ensevelissement au cours d'une catastrophe universelle parce que la croissance des arbres associés aux couches de charbon nécessitait trop de temps (Figure 1). Cette observation et cet argument furent des facteurs importants dans le changement d'opinion concernant l'origine du charbon, de celle par accumulation et ensevelissement rapides de fragments végétaux à celle par croissance, accumulation et ensevelissement graduels.

La vision que l'on trouve la plus convaincante, ensevelissement catastrophique ou accumulation graduelle, dépend assez du paradigme avec lequel on approche le sujet. Puisque l'auteur et la plupart des lecteurs de cet article soutiennent une vision du monde influencée par la Bible, nous nous concentrerons davantage sur des indices qui supportent l'histoire biblique. Cependant, certains des arguments en faveur de la croissance et de l'accumulation graduelle doivent aussi être examinés.

La plus grande partie du charbon est clairement composée de matière végétale telle que troncs d'arbres, branches, écorce, feuilles, aiguilles et fragments végétaux ayant macéré. Les charbons du Carbonifère (habituellement du type le plus dur) sont composés de fougères, de mousses, de prêles et autres plantes non classées parmi les plantes à graine que sont les arbres à feuillage persistant ou caduc et les plantes à fleurs. Les charbons les plus tendres (habituellement plus haut dans la colonne stratigraphique) sont principalement le produit d'arbres ensevelis à feuillage persistant et à feuillage caduc. Parce que le charbon révèle qu'il est composé de restes de plantes, les plantes doivent avoir grandi là où le charbon se trouve maintenant (autochtones) ou elles doivent avoir été transportées vers l'emplacement actuel des couches de charbon (allochtones).

Questions soulevées par les couches de charbon.

La première question évidente que l'on pourrait peut-être se poser serait : « Une couche de charbon ressemble-t-elle à une tourbière ou à un marécage ensevelis ? »   Pour répondre à cette question, il est nécessaire de connaître un peu les tourbières et les marécages. Une tourbière est habituellement composée d'un type particulier de mousse, le Sphagnum. Il peut y avoir d'autres plantes associées à la tourbe, mais la plante dominante est le Sphagnum. Un marais ou un marécage peuvent contenir une plus grande variété de types de plantes, principalement les plantes qui se développent en milieux humides. Pour les tourbières, la réponse à la question posée plus haut est nettement négative. Il est clair que la plus grande partie du charbon n'est pas de la tourbe ensevelie.4 Pour un marais ou un marécage la réponse n'est pas aussi claire, particulièrement pour les charbons du Carbonifère. De nombreux types de plantes dans ces charbons se sont éteints.5 Nous ne pouvons être certains que leur habitat préféré soit des terres inondables. L'étude des parents proches actuels de ces plantes indique que la plupart d'entre elles ne vivaient pas dans des marécages. Les charbons du Crétacé à l'Eocène proviennent principalement d'arbres forestiers. Certains arbres comme le cyprès poussent souvent dans des terres marécageuses aujourd'hui, mais beaucoup d'autres ne pourraient survivre dans un tel milieu.

Une autre question évidente serait : « Les terres inondables actuelles fournissent-elles un modèle adéquat pour les grands dépôts de charbon ? »   Pour cette question la réponse est plus tranchée et fut utilisée par les premiers géologues pour appuyer leur hypothèse du Déluge. Bien que quelques marais et marécages couvrent de grandes surfaces, par exemple le Dismal Swamp de Virginie aux Etats-Unis, de nombreuses couches de charbons sont beaucoup plus étendues. La couche de Pittsburg couvre une partie des Etats de Pennsylvanie, de l'Ohio et de la Virginie de l'Ouest, une surface de    5 000 kilomètres carrés, et a en moyenne une épaisseur d'un peu plus de 2 mètres. Le bassin houiller des Appalaches s'étend sur quelques 180 000 kilomètres carrés. La quantité de charbon exploitable atteint des milliards de tonnes. On a calculé que le bassin de Powder River du Wyoming

(30 000 kilomètres carrés), aux Etats-Unis, avait environ 22 milliards de tonnes de charbon exploitable. On estime que la vallée de Latrobe, en Australie, peut produire 70 milliards de tonnes de charbon. La profondeur ou l'épaisseur des couches de charbon est encore moins comparable aux accumulations organiques actuelles.

Problèmes de la théorie de l'accumulation.

Un examen plus détaillé de la théorie autochtone fait apparaître des problèmes. Certains charbons contiennent des restes d'animaux, habituellement des animaux marins.6 Spirorbis, un petit ver à tube spiralé de moins de 5 mm de diamètre, en est un exemple classique (Figure 2). La présence d'un ver marin dans des couches d'origine tourbeuse ou marécageuse qui sont considérées comme autochtones ne s'accorde pas bien avec une hypothèse uniformitariste. Pour éviter ce problème, on déclare que Spirorbis a vécu dans un milieu d'eau douce au Carbonifère même s'il est trouvé communément d'un bout à l'autre de la colonne stratigraphique et dans les océans actuels fixé sur des coraux, des mollusques et des algues marines.7 De toute évidence, un ver marin dans du charbon est un argument en faveur de l'implication de la mer dans la formation du charbon.

Le charbon montre souvent une préservation minutieuse des débris organiques originels. Si le charbon était le produit d'une accumulation de plantes dans des tourbières ou des marais, on s'attendrait à un certain degré de décomposition. Quelquefois de délicats fossiles de frondes de fougères et de feuilles se trouvent directement sous le système radiculaire d'arbres pétrifiés debout (Figure 3). Si les arbres ont vraiment poussé là où ils se trouvent actuellement, tout reste organique comme les frondes de fougère et les feuilles se serait décomposé pendant le temps requis par la croissance des arbres et avant l'ensevelissement et la pétrification.

L'un des arguments les plus forts en faveur de l'hypothèse que le charbon dérive de fragments de plantes ensevelis sur place vient des « racines » (Stigmaria) des arbres pétrifiés debout associés au charbon. Ceux-ci sont des mousses géantes avec des troncs d'un mètre de diamètre et atteignant jusqu'à 35 mètres de hauteur. Les Stigmaria, habituellement de plusieurs centimètres de diamètre et parfois de plusieurs mètres de longueur, portent de nombreuses « radicelles » (appendices) qui pénètrent dans les sédiments (Figure 4). Par leur aspect elles peuvent être comparées à un goupillon géant. Le rayonnement de ces appendices dans les sédiments est considéré comme un indice qu'elles sont dans une position de croissance.8

La controverse sur la nature des « racines » de Stigmaria s'est engagée dès le début de l'étude du charbon, mais jusqu'à présent on n'est parvenu à aucun consensus net. Les mousses actuelles (petites plantes grimpantes dépassant rarement un mètre de hauteur) ont des rhizomes rampants souterrains semblables par la structure aux Stigmaria des mousses géantes. Mais si les Stigmaria de ces mousses sont des rhizomes rampants souterrains, où sont les véritables racines ? Aucune n'a été retrouvée avec ces géants fossiles. Peut-être ces Stigmaria servent-elles de vraies racines ainsi que d'organe de propagation de nouvelles pousses.

Bien que les Stigmaria avec leurs appendices rayonnants semblent à première vue être dans leur position de croissance, certains détails suggèrent une autre explication. D'habitude, les Stigmaria sont des fragments isolés, déconnectés de la base des arbres. Cependant même ces fragments montrent des appendices se propageant dans les sédiments. Le tronc des grandes mousses pétrifiées en position dressées sont creux et remplis de sédiments. Parfois des fragments de Stigmaria ont été introduits avec les boues et les sables qui remplissent les souches creuses.9 Dans ces cas-là aussi les appendices rayonnent depuis leurs points d'attache suivant une spirale. Apparemment les appendices étaient assez résistants pour empêcher leur chute lors de leur ensevelissement dans la boue et le sable. Les couches d'argile feuilletée étaient peut-être des boues dans lesquelles des fragments de Stigmaria avec leurs appendices ont été transportés. Ou alors les Stigmaria et les appendices avec de fins sédiments se sont déposés à partir d'une suspension boueuse. Si des fragments de Stigmaria brisées avaient été transportés par l'eau ou la boue, ils devraient présenter un alignement préférentiel suivant la direction du courant. Ceci a été rapporté en Nouvelle-Ecosse (Canada) et en Hollande.10

Bien que le problème des Stigmaria et des appendices rayonnants ne puisse être complètement résolu, l'étude des Stigmaria appuie les arguments en faveur d'un transport autant que ceux en faveur d'une croissance in situ.

Transformation des fragments végétaux en charbon.

Le processus de transformation des fragments végétaux en charbon a suscité l'intérêt pendant plusieurs années. Des expériences de laboratoire ont réussi à transformer du tissu végétal en charbon en moins d'une année.11 Des poutres utilisées à l'intérieur d'antiques mines de charbon dans lesquelles on est retourné récemment sont parfois carbonifiées. La récente découverte du rôle catalytique de l'argile dans le processus de carbonification est importante.12 Si l'argile a été un ingrédient nécessaire à la transformation de la matière végétale en charbon, un déluge universel expliquerait mieux la source d'argile que ne le ferait un milieu uniformitariste de terres inondables.

La quantité de matière végétale estimée nécessaire à la production d'un mètre de charbon est de 5 à 20 mètres, selon la dureté du charbon. Les accumulations actuelles de restes végétaux (comme dans une tourbière) dépassent rarement une profondeur de 10 à 20 mètres. Selon cette formule, une tourbière de 20 mètres de profondeur produirait un à quatre mètres de charbon. De nombreuses couches de charbon sont plus épaisses que cela. Des couches de charbon de 30 mètres d'épaisseur ne sont pas rares. Certaines atteignent plus de 100 mètres d'épaisseur et en Australie il y en a une de plus de 240 mètres d'épaisseur ! L'accumulation de matière végétale de 1 200 mètres ou plus d'épaisseur (5 x 240), nécessaire à la production de dépôts de charbon aussi épais, est étonnante, même en prenant en considération le modèle du Déluge. Cependant, aussi extraordinaire que cela puisse paraître, il est plus facile de se représenter une accumulation catastrophique de restes végétaux dans un bassin qui s'affaisse que la formation in situ de tourbières de cette dimension.

Des couches successives de charbon séparées par quelques centimètres à quelques mètres de sédiment sont fréquentes. Si ces couches sont autochtones, cela exige le développement successif de tourbières ou de marécages les uns au-dessus des autres pendant des millénaires. Des milieux tourbeux ou marécageux exigent des conditions particulières. La répétition à maintes reprises de telles conditions pour produire de nombreux niveaux successifs de charbon au même endroit est irréaliste (Figure 5). Les processus géologiques qui amenèrent l'ensevelissement d'une couche de matière végétale effaceraient probablement les conditions nécessaires à la production d'une autre tourbière au même endroit.

Le transport et le dépôt répétés d'amas de restes de plantes flottantes et leur ensevelissement ultérieur fournissent une explication plus raisonnable. Une recherche récente suggère que les marées, avec leurs flux et reflux quotidiens, pourraient être impliquées dans le transport et le dépôt répétés de fragments végétaux en suspension.13

Dans le bassin de l'Indiana, j'ai observé des dépôts rythmiques (considérés comme le résultat de l'action des marées) associés à des caractéristiques typiques de sédiments houillers du Carbonifère. Cependant les fluctuations quotidiennes des marées déposeraient la boue trop rapidement pour permettre la croissance des plantes. La présence de celles-ci dans de tels dépôts exige un transport. L'observation d'arbres flottants révèle qu'avec suffisamment de temps et d'eau de nombreux troncs flotteront et couleront debout.14

L'ensevelissement catastrophique de fragments végétaux et leur transformation ultérieure en charbon n'est pas acceptée par la plupart des géologues spécialistes du charbon. Cependant la théorie dominante de la tourbière présente des problèmes qui sont restés sans réponse pendant plus de cent ans. Un modèle faisant intervenir le Déluge dans la formation du charbon répond à certains de ces problèmes et fournit une explication scientifiquement raisonnable de l'origine des grandes quantités de charbon qui existent sur toute la planète.

Harold G. Coffin (Ph.D., Univ. of Southern California) a été professeur de biologie dans des collèges du Canada et des Etats-Unis, et chercheur au Geoscience Research Institute à Loma Linda, en Californie. Il a écrit de nombreux articles et plusieurs livres dont Creation : Accident or Design ? (1969), Earth Story (1979) et Origin by Design (1983).

Notes et références

   1. Nicolaus Steno (1630-1687) fut parmi les premiers qui avancèrent une origine diluvienne des fossiles et des strates sédimentaires. A son époque c'étaient des propositions nouvelles. Il y eut ensuite d'autres géologues notables qui défendirent le Déluge : John Woodward (1667-1727) et Jean-André Deluc (1727-1817).

   2. L'interprétation uniformitariste de l'histoire de la terre établie principalement par James Hutton et Charles Lyell tente d'appliquer la vitesse actuelle des processus géologiques au passé. Par exemple, on a supposé que les vitesses moyennes d'érosion et de sédimentation observées aujourd'hui sont des modèles satisfaisants pour la compréhension des processus similaires passés.

   3. Charles Lyell, « On the Upright Fossil Trees Found at Different Levels in the Coal Strata of Cumberland, Nova Scotia », Proc. Geol. Soc. London 4 (1843), p. 176-178.

   4. Wilfrid Francis, Coal, Its Formation and Composition (London : Edward Arnold Publishers Ltd., 1961).

   5. A. C. Seward, Fossil Plants (New Work : Hafner Pub. Co., Inc., 1898-1919, 1963).

   6. Sergius Mamay et Ellis L. Yochelson, « Occurence and Significance of Marine Animal Remains in American Coal Balls », U.S. Geol. Surv. Prof. Papers 354-I (1961), p. 193-224.

   7. Harold G. Coffin, « A Paleoecological Misinterpretation », Creation Res. Soc. Quart. 5 (1968), p. 85. Spirorbis (Annélides) a une larve trochophore. Plusieurs autres phylums comportent aussi des espèces à larves trochophores. Aucune espèce d'eau douce n'a de larves trochophores.

   8. W. E. Logan, « On the Character of the Beds of Clay Immediately Below the Coal-Seams of S. Wales », Proc. Geol. Soc. London 3 (1842), p. 275-277. Cette note intéressante de Logan fut l'une des premières à montrer l'abondance de Stigmaria et d'appendices dans les murs argileux situés sous les couches de charbon. Logan proposa l'idée selon laquelle cette argile était le sol sur lequel se développèrent les végétaux à l'origine du charbon et que les Stigmaria et leurs appendices représentaient des racines encore en place. Les recherches depuis lors ne réussissent pas à appuyer l'idée que ces argiles étaient des sols. Voir Leonard G. Schultz, « Petrology of Underclays », Geol. Soc. Am. Bull. 69 (1958), p. 363-402.

   9. Richard Brown, « Section of the Lower Coal-Measures of the Sydney Coalfield, in the Island of Cape Breton », Quart. Jour. Geol. Soc. London, 6 (1850), p. 127. Alors que je faisais des recherches sur les couches de charbon de Nouvelle-Ecosse au Canada, j'ai aussi documenté deux exemplaires de fragments de Stigmaria à l'intérieur de souches creuses. Voir Harold G. Coffin, « Research on the Classic Joggins Petrified Trees », Creation Res. Soc. Annual (1969), p. 35-44, 70.

10. N. A. Rupke, « Sedimentary Evidence for the Allochthonous Origin of Stigmaria, Carboniferous, Nova Scotia », Geol. Soc. Am. Bull. 80 (1969), p. 2190-2114 ; W. F. M. Kimpe and A. A. Thiadens, « On the Occurrence of Coal Raft Above and Rhizome Inclusions in Seam Finefrau B, South Limbourg, Holland », Proc. Third Inter. Cong. of Sedimentology, Groningen-Wageningen (1951), p. 167-173.

11. John, Larsen, « From Lignin to Coal in a Year », Nature 31 (March 28, 1985), p. 316.

12. R. Hayatsu, et al., « Artificial Coalification Study : Preparation and Characterization of Synthetic Macerals », Organic Geochemistry 6 (1684).

13. « Blame it on the Moon », Scientific American, février 1989, p. 18.

14. Harold G. Coffin, « L'énigme des arbres pétrifiés », Dialogue 4:1 (1992), p. 11-13, 30-31.


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