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Jon Johanson : Dialogue avec un champion d’aviation adventiste d’Australie Lee Dunstan
Peut-on être en même temps infirmier et pilote ? Jaime faire les deux. Mon métier dinfirmier me permet de gagner suffisamment pour pouvoir voler. Cela me donne aussi loccasion dêtre en contact avec ceux qui souffrent. Par exemple, à Oshkosh, tandis que je faisais des mises au point sur mon appareil, jai vu un homme seffondrer dune crise cardiaque. Ma formation dinfirmier ma permis de lui porter secours. Jai pu lui administrer les soins durgence en attendant larrivée de lambulance. Pour ce qui est de laviation, jai toujours aimé cela, sans jamais vraiment penser que je pourrais un jour en faire. Je ne me croyais pas assez doué. Jai toujours eu une piètre opinion de moi-même. Pourquoi ? Lécole ne ma pas fait grand bien. Javais létrange impression de personnifier léchec. Particulièrement en anglais. Jétais lamentable en orthographe et, à vrai dire, cela ne mintéressait pas. Je me disais, pourquoi se casser la tête à épeler, aussi longtemps quon peut sen sortir à la lecture ! Sans compter certains profs qui narrêtaient pas de dire que jétais « un cas ». Peut-être bien. Mais cela narrangeait pas les choses de se lentendre dire constamment. A la fin du secondaire, jétais convaincu que je ne serais jamais rien. Et lavion ? Je naurais jamais pensé que jobtiendrais un jour ma licence. Alors, en faire une carrière, pensez donc ! Mais les choses ont changé depuis, nest-ce pas ? Les leçons de vol mont vraiment aidé. Il est impossible de voler si on na pas confiance en soi, si on ne croit pas quon peut voler dans les airs et redescendre sain et sauf. Cest vous qui contrôlez lavion. Si on est capable de contrôler un avion, pourquoi pas sa propre vie ? De plus, on nest jamais seul dans la vie. Je suis chrétien et je crois quavec Dieu tout est possible. Jai appris à faire fi du quen dira-t-on. Chaque fois que je visite une école, je dis aux enfants : « Ne vous laissez pas décourager par les critiques des autres. Ne retenez que ce qui en vaut la peine, et continuez davancer. Il ne faut jamais baisser les bras. » Auriez-vous une expérience à partager avec nous à ce propos ? Au travail, à la maternité, une collègue me lança : « Vous les hommes, vous ne valez vraiment pas grand-chose. Vous nêtes même pas capables de tricoter ! » Jai tout de suite réagi. Le lendemain, je me suis pointé avec mes aiguilles à tricoter et de la laine. Quand jai terminé mon premier pull, laffaire était classée. Je me suis dit : Eh bien ! Qui aurait dit que je men sortirais ! En tous cas, jai compris que je pouvais réussir si je my mettais. Pourtant ce nest pas toujours aussi simple. Encore à présent, il marrive de douter de moi. Mais jen ai pris mon parti. Sur ma carte de visite, jai fait inscrire ma devise : « Une fois parti, plus moyen de larrêter. » Vous avez mentionné votre foi en Dieu. Vous avez établi des records daviation autour du monde. Quand vous pilotez, pensez-vous à Dieu ? Je suis un adventiste de la quatrième génération. Au sens traditionnel du terme, je ne suis pas un « bon » adventiste. Mais pour moi, avec Dieu, cest tout ou rien. Ou bien on accepte Dieu dans sa vie ou pas du tout. Je naurais jamais pu faire ce que je fais voler autour du monde sans lintervention divine. Jai en moi limpression indélébile reçue au cours dun vol de plus de quinze heures entre Hawaii et la Californie. Jai vu le soleil se coucher et puis réapparaître. Dans ces moments-là, on ne peut sempêcher de penser à Dieu, à la vie et à la création. Pendant toute la nuit, jai eu un sentiment très distinct. Cétait comme si Dieu me portait. Pour quelquun qui ne croit pas, cela peut sembler stupide. Mais pour moi, Dieu est réel, personnel. Des centaines de personnes priaient pour moi. Et je me sentais porté par la puissance de la prière. Parlez-nous un peu de votre record mondial. Ah, cest un vieux rêve ! Jai monté un appareil RV-4 à partir de pièces détachées fabriquées par une compagnie située à Portland, en Oregon (U.S.A.). Au départ, tout ce quon a entre les mains, cest une série de plans, un tas de morceaux daluminium, et 13 000 boulons. Il ma fallu trois ans pour monter cet avion dans un atelier de location, pendant le peu de temps qui me restait chaque jour après avoir fait le quart de nuit. En plus, lavion nétait pas conçu pour un vol de longue distance tel que celui sur Oshkosh. Il fallut faire toutes sortes de modifications pour quil soit réglementaire. Mon premier survol de la mer eut lieu en février 1995, départ dAdélaïde, Australie, sur Auckland, Nouvelle-Zélande. Un vol de 14 heures. Cest ensuite que jai rêvé daller à Oshkosh. Le 13 juillet, jai décollé de Brisbane, en direction de lest, au-dessus du Pacifique, avec escales à Fidji, aux Samoa occidentales, à lîle Christmas, en Hawaii et en Californie ; pour finalement atterrir à Oshkosh sous les acclamations chaleureuses de la foule. Cela ne sétait encore jamais vu : arriver de si loin sur Oshkosh à bord dun avion fait-maison. De là, nous sommes partis pour le Maine, au nord-est des Etats-Unis, lEspagne, Londres, le Moyen-Orient, lInde, Singapour, pour finalement nous retrouver à Darwin. Le voyage a duré en tout 71 jours et 19 heures. Avez-vous encore des rêves ? Oui, jaimerais faire dautres choses. Jaimerais construire encore un autre avion juste parce que jen ai envie. Mais une chose à la fois... Mon but premier est de témoigner aux autres, plus particu-lièrement aux enfants, et de montrer quaux yeux de Dieu nous avons tous de la valeur ; quavec Dieu tout est possible, même pour quelquun comme moi, un garçon qui navait aucune confiance en lui-même dans son enfance. Chaque fois que loccasion se présente, je répète aux garçons et aux filles quils peuvent réussir. Il leur faut simplement tourner chaque situation à leur avantage. Considérez-vous que vous avez réussi ? Pas du tout ! Cest sûr que cest exaltant davoir accompli ce que certains considèrent comme un haut fait, mais dautre part, toutes ces tapes dans le dos ne sont, après tout, que des opinions humaines. Au bout du compte, elles ne signifient pas grand-chose. Ce nest pas que je ne les apprécie pas. Bien sûr que si, mais dans la vie, il ny a pas que les applaudissements. Ce que jai choisi de faire a entraîné ce genre ce succès. Mais si quelquun a travaillé dur pour arriver où il en est, il nest pas moins méritant et son succès est tout aussi conséquent, sinon plus. En plus du succès, y a-t-il quelque chose de mémorable que vous aimeriez nous raconter au sujet de ce tour du monde ? Jai eu de nombreux sponsors, des personnes individuelles ainsi que des organisations, et je leur suis très reconnaissant. Jai mis des autocollants de ces sponsors sur mon avion. Mais ce sont les deux autocollants représentant un poisson qui immanquablement attirent le plus lattention. On me demande toujours ce que cela signifie. Je réponds que le poisson symbolise mon plus Grand Sponsor. Le poisson est, comme vous le savez, le symbole quutilisaient les premiers chrétiens pour exprimer leur foi en Christ. Je tiens à exprimer publiquement que je suis chrétien. Ma foi en Christ, cest ce qui compte le plus pour moi. Vous avez décidé dêtre ambassadeur pour Christ ? Je donne des leçons de pilotage à des étudiants du monde entier. Mais cest le commentaire dun étudiant musulman dOman qui ma fait prendre conscience de lultime impact de ce que je fais. « Jon fait plus que de nous apprendre laérodynamique, a-t-il dit. Il nous apprend à vivre. » Je ne lavais jamais compris avant. Mes priorités sont claires pour ceux qui mentourent. Et quand jy pense, quelquefois cela me fait un peu peur. Interview par Lee Dunstan. Lee Dunstan est rédacteur à la Signs Publishing Company, Warburton, Victoria, Australie. Adresse de Jon Johanson : 53 Winns Road ; Coramandel Valley ; Australie-Méridionale 5051 ; Australie. |