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La même histoire, racontée autrement Alberto R. Treiyer La Passion du Christ, de Mel Gibson, est la même histoire racontée autrement, et nous y réagissons en fonction de nos divers points de vue. Certains Juifs ont combattu le film pour l’antisémitisme qu’ils y percevaient, alors que des pays musulmans ont autorisé sa projection après avoir entendu parler de cette réaction. Quelques autorités séculières présument qu’il exalte la violence sans comprendre le vrai contexte de la Croix, et des chrétiens ont été profondément choqués par ce que Gibson a ajouté au récit des évangiles. Pourtant, la majorité des gens ont été impressionnés par le message du film et les médias ont signalé d’étonnantes conversions de gens ayant vu la Passion. Une valeur missionnaire De nombreuses assemblées adventistes d’Amérique du Sud sont allées offrir des livres sur la vie du Christ à proximité des cinémas où passait le film. Passion of the Ages, édition spéciale des 14 derniers chapitres de Desire of Ages d’Ellen White (édition française : Jésus-Christ) a été publié aux États-Unis. Le film lui-même sera bientôt disponible en vidéo et sur DVD, rendant possible son utilisation dans une perspective missionnaire personnelle et pour des réunions d’évangélisation. Des films antérieurs avaient montré un Jésus peu patient face à ses opposants ou, au contraire, trop gentil avec les gens. Certains pasteurs, néanmoins, les avaient projetés au cours de mes campagnes d’évangélisation afin de préparer l’auditoire à écouter le message de la Bible. Après la projection, j’avais coutume de dire que les acteurs, tout comme nous en tant que chrétiens, ne pouvaient représenter pleinement le parfait caractère du Fils de Dieu. Je m’attends à devoir dire la même chose quand on projettera un extrait du film de Gibson avant mes prochaines conférences. Quant aux plus sensibles de nos pasteurs, ils préféreront peut-être supprimer les scènes les ayant le plus perturbés. Que faudrait-il ôter ? Certes, j’ai fini par trouver excessif le grand nombre de fois où Marie apparaît dans le film. Son rôle, pourtant, n’a pas déplu à ma femme. Mais nous sommes tombés d’accord qu’il vaudrait mieux éliminer, car n’ayant aucun sens, la scène où elle essuie le sang de son fils, répandu sur le plancher, avec une cape donnée par l’épouse de Pilate. Par contre, le fait est que les évangiles racontent que Marie suivit son Fils jusqu’à la croix, en compagnie d’autres femmes fidèles. Certains voudraient probablement effacer le diable de ce film. Mais il est facile d’imaginer qu’il était présent à Gethsémani, en compagnie des démons, s’efforçant de décourager le Seigneur. À d’autres moments du film, le diable est bien représenté, observateur de tout ce qui se passe. J’éliminerais la représentation des démons par des enfants ou des nains tourmentant Judas. Quant au portrait final du diable en monstre fou de rage, ce n’est pas ce qu’il y a de mieux. L’extrême brutalité subie par Jésus dans le film pourra en choquer plus d’un. Mais les autorités d’alors ont-elles traité le Seigneur avec douceur ? J’ai été touché par la dignité manifestée par le Fils de Dieu sous les provocations et les insultes. Quelques scènes de châtiment supplémentaire infligé quand il porte la croix peuvent aussi être retirées car elles ne figurent pas dans les évangiles. Pourtant, le livre Jésus-Christ — biographie inspirée et géniale — dépeint des soldats prenant part aux quolibets et aux mauvais traitements infligés à Jésus par la populace, ainsi que d’autres Romains le protégeant de la multitude qui voulait le lyncher sur le chemin du Calvaire. Messages théologiques La Passion est très claire dans sa représentation de l’amour du Fils de Dieu pour ses pires ennemis et condamne ainsi implicitement toute notion de génocide « chrétien ». La patience et l’abnégation qui doivent être les nôtres en tant que vrais chrétiens lorsque nous sommes calomniés et persécutés, le noble exemple de maîtrise de soi face au harcèlement et aux insultes — tout cela, et bien plus encore, figure avec grande force dans le film de Gibson. Jésus piétinant le serpent, bien qu’il ne s’agisse pas d’une image littéralement biblique, exprime le triomphe du Christ sur Satan (voir Genèse 3.15 ; Apocalypse 12.9). Contrairement aux ambitions politiques de son Église, Gibson nous montre que le royaume de Dieu n’est pas de ce monde. Il nous amène aussi à nous confronter à la souffrance du Fils de Dieu, dans les yeux de Judas, de Pierre, de Marie et de la pécheresse qu’il identifie avec raison comme étant Marie-Madeleine (voir Jésus-Christ, p. 532). Les carences du film Nous ne pouvons exiger de Gibson qu’il mette dans son film tout ce que nous aimerions y voir. Jean a écrit le dernier des évangiles parce qu’il trouvait que nombre d’événements importants ne figuraient pas dans les trois premiers. Mais il a bien dû reconnaître que « le monde même ne pourrait contenir les livres qu’on écrirait » pour que l’histoire fût complète (Jean 21.25, NBS). D’ailleurs, il lui a fallu rédiger encore ses épîtres et l’Apocalypse pour expliquer la Croix et la placer dans la perspective de la fin du monde. Il nous revient donc de raconter aux gens ce qui ne se trouve pas dans le film de Gibson. Que d’autres aussi viennent compléter notre témoignage avec leur propre expérience, parce que nul ne pourra venir à bout de cette histoire. « La croix de Jésus-Christ sera la science et le chant des rachetés pendant les siècles éternels. » (Ellen White, La tragédie des siècles, p. 706). Alberto R. Treiyer (doctorat de l’université de Strasbourg), théologien et évangéliste, est l’auteur de plusieurs livres et articles. Adresse de son site Web : www.tagnet.org/distinctivemessages. |